Voici quelques années qu’une certaine mutation s’opère sur le marché du travail : cristallisés par la crise sanitaire, différents facteurs viennent bouleverser la conception de chacun sur l’équilibre entre vie professionnelle et vie privée. Avec cette réflexion viennent de nouvelles pratiques qui bousculent radicalement les modèles jusqu’ici plébiscités. Et l’émergence massive du télétravail catalyse de nouvelles aspirations, en particulier chez les jeunes travailleurs·ses. Par ailleurs, la place croissante du numérique sur les différents marchés permet d’ouvrir de nouvelles portes, et favorise le développement du nomadisme numérique, où la présence physique n’est plus une condition indispensable à l’exercice de l’activité professionnelle.

Il s’agit là de l’essence d’une nouvelle génération de jeunes travailleurs·ses, qui aspirent à davantage de liberté dans la manière d’agencer leurs quotidiens. Les Digital Nomads sont par définition des individus qui ont la possibilité de gérer la totalité de leur activité professionnelle à distance. Grâce aux outils digitaux, il leur est possible de travailler depuis n’importe quel endroit dans le monde, pourvu qu’il y ait une bonne connexion internet. En 2021 aux Etats-Unis, on estime à 15 millions le nombre de personnes qui ont fait ce choix, contre un peu moins d’un million en France.  Avec une moyenne d’âge de 32 ans, les Digital Nomads représentent une génération ouverte sur le monde, désireuse de s’émanciper d’un quotidien trop redondant et des dogmes du monde du travail classique. Travaillant en majorité dans le développement informatique, le marketing, le design ou encore la création d’entreprises, 36% des Digital Nomads sont en freelance, contre 33% en auto-entreprenariat. Ces statuts confèrent une liberté d’autant plus grande qu’ils ne sont pas contraints par des cadres professionnels préétablis, et laissent donc plus de latitude aux individus. Ce phénomène fait finalement écho à un idéal de mode de vie plus large, où chacun doit pouvoir se réaliser et s’épanouir sans que l’activité professionnelle ne constitue une entrave. On y fait le choix de la liberté d’action et de mouvement, au prix du confort que peut offrir la sédentarité. Et c’est dans cette logique que de nombreux pays et localités œuvrent afin d’attirer les Digital Nomads sur leurs territoires, tout en facilitant leur venue. 

Dans la continuité de plusieurs pays européens, parmi lesquels l’Estonie, pionnière en la matière, les Pays-Bas ou encore Malte, le Portugal a donc annoncé la mise en place d’un nouveau visa, directement à destination des Digital Nomads. En vigueur dès le 30 octobre, ce sésame donnera accès au territoire pour une durée d’un an, renouvelable 5 fois. L’obtention de ce visa est cependant conditionnée à plusieurs éléments : une attestation de résidence fiscale, un contrat de travail et un revenu minimum exigé de 2800 euros, correspondant à quatre fois le salaire minimum portugais. Le pays est une destination de plus en plus attractive pour les Digital Nomads, et en particulier pour la communauté anglo-saxonne. Cependant, cette annonce s’inscrit également dans une politique plus globale du Portugal, désireux de dynamiser ses connexions internationales et les investissements sur son territoire.

Car cette nouvelle législation fait écho à une volonté très marquée du gouvernement portugais, qui souhaite attirer sur son territoire de nouvelle forces vives dans des domaines clés du digital. Il s’agit également de dynamiser l’économie du pays avec l’arrivée de nouveaux individus aux compétences recherchées et qui apportent avec eux un fort pouvoir d’achat. Cette nouvelle main d’œuvre donne au pays une grande attractivité à la fois aux niveaux professionnel et économique, mais aussi en termes de culture et de tourisme, boostés par ces échanges internationaux. En faisant converger sur son territoire de nouveaux talents, le Portugal entend donc trouver un rayonnement international dans les sphères du digital et du numérique.  

En plus de son climat très favorable, le pays compte également un bon nombre d’atouts pour attirer de nouveaux Digitals Nomads sur son territoire, le premier d’entre eux étant sa facilité d’accès à la fois économique, le coût de la vie y étant relativement faible, mais aussi géographique et culturelle. L’usage de l’anglais y est très répandu, et la localisation du Portugal permet de nombreuses connexions avec les autres pays européens. De nombreuses actions sont aussi menées grâce aux politiques locales qui tendent à faciliter et améliorer la vie des Digital Nomads sur place. Les grandes villes portugaises comme Lisbonne ou Porto ont aménagé un grand nombre d’espaces dédiés au coworking, avec un accès internet très étendu. En parallèle, les pouvoirs publics soutiennent aussi plusieurs autres projets d’importance, comme Lisboa Empreende + qui accompagne la création d’entreprise, ou encore Work From Centro de Portugal, qui promeut quant à lui les opportunités de télétravail dans le pays. Enfin, le pays organise chaque année à Lisbonne le Web Summit, qui réunit environ 70 000 personnes, autour des thématiques de la tech et du digital.  

Ces initiatives sont aussi endémiques d’une tendance plus générale à la mobilité et à la flexibilité. Les jeunes actifs, qui représentent une grande majorité des Digital Nomads, aspirent en effet à davantage de liberté que ne peut leur offrir le marché du travail classique. Et devant cette mutation, beaucoup de pays s’organisent pour accueillir et attirer ces nomades numériques, qui semblent être les pionniers d’une nouvelle conception de l’équilibre entre obligations professionnelles et épanouissement personnel. Et vous ? Quel pays vous fait rêver ?

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